Fantasmes et repostionnements (complément)

14Nov06

Je découvre avec un peu de retard le billet que Jean-Michel Salaün a mis sur son blogue et qui fait une synthèse en 5 propositions de ses nombreux billets sur l’économie du numérique. Elle tombe à pic pour compléter le billet précédent qui se termine sur l’interrogation laissée ouverte par N. Carr sur le modèle économique de la nouvelle position des médias institués (mainstream media) sur le web.Je cite JMS:

Si l’on en croit les études citées, le Web a deux sources de revenus : la vente en ligne où eBay est, de loin, le principal joueur pour les US (voir par ex le billet de D. Durand à ce sujet) ; la publicité où, toujours pour les US, Google et Yahoo! sont les leaders.

Ce qui ne répond pas forcément à l’interrogation de N. Carr: il est douteux que la publicité puisse adéquatement rémunerer la production professionnelle d’information et les dispositifs éprouvés de vente en ligne ne semble pas adapté au commerce de l’information – il y a peut-être un nouveau modèle de syndication numérique à inventer.

Autre chose: j’avais en tête en rédigeant le billet précédent le parallèle, s’agissant des inquiétudes de la profession journalistique, de celles de ces autres intermédiaires que nous sommes, nous autres bibliothécaires en face du développement hors de nos institutions des bibliothèques numériques. J’avais évoqué au printemps dernier le fantasme de la bibliothèque universelle (qui est bien de la même espèce que celui de la production « désautorisée », déhiérarchisée et universelle du savoir et de l’opinion) et plaidé pour le repositionnement de notre fonction. Je me sens conforté de voir que JMS conclut sa synthèse par cette proposition: les institutions documentaires doivent se positionner (j’aurais dit se re-positionner).

PS un peu décalé: Quant au fantasme, ceux qui ne l’ont pas encore fait, peuvent lire la charge anti-Wikipedia (et anti-Kevin Kelly, lequel articule justement le fantasme ou l’utopie de la bibliothèque universelle à celui de production collective égalitaire du savoir) publiée au printemps dernier par Jaron Lanier sous le titre « Digital Maoism » et qui n’a que le tort de prendre le fantasme wikipedien au pied de la lettre. (Un détail marginal mais amusant: comparer le premier paragraphe de l’article avec la présentation de l’auteur sous l’article!)

MàJ: Avec BEAUCOUP de retard, je découvre le billet d’Olivier Ertzscheid sur l’étude Edelman / Technorati publiée le mois dernier où se trouve analysée la structure d’influence de la blogosphère française. Pour le sujet qui nous intéresse ici, je note deux choses:

– une particularité de la blogosphère française:

Les blogueurs français les plus influents ont tendance à majoritairement pointer vers d’autres blogs français, alors qu’aux Etats-Unis et en Italie, ils pointent majoritairement vers des sites de presse ou d’actualités. Plus précisément : « Just like the U.S., there  is a good deal of interdependence between bloggers and mainstream media: In Italian and German, the top 10 blogs link heavily to mainstream  media, though in France the Top Ten bloggers link to each other 29% more often  than they link to regional media. » (Steve Rubel)

Cette idiosyncrasie n’aurait-elle pas quelque chose à voir avec le fait que dans la crise globale de la presse, la presse nationale est l’une des plus touchées?

– une discussion / contestation de la méthodologie de Technorati (voir aussi les commentaires). J’avais effectivement un scrupule hier en rendant compte du billet de N. Carr de n’avoir pas posé au moins un point d’interrogation sur la méthodologie (mais cela est fait dans les commentaires au dit billet).